Bernard Simonay dont j'ai déjà parlé sur le blog ici, m'a fait l'immense joie d'accepter une interview exclusive que je partage aujourd'hui avec plaisir.
Régalez-vous bien !
Vous êtes l'auteur de nombreux romans et avez parcouru de
votre plume plusieurs grands domaines : policier, aventure, historique mais
aussi fantastique dont fantasy. Quels éléments vous attirent dans la
littérature fantastique et pourquoi ?
Je
n’aime pas être enfermé dans un genre donné. Mon éditrice, Jeannine Balland,
s’est étonnée, et Jean-Paul Bertrand avant elle, que je puisse ainsi changer de
genre sans aucune difficulté. Je suis romancier, tout simplement. Et pour moi,
chaque livre est un voyage dans un monde que je créée, mais qui se crée
lui-même également. Nous ne faisons que lancer quelques idées au départ et le
reste se met en place presque tout seul. Il y a toujours des moments de
découvertes, des éléments qui nous apparaissent peu à peu, comme un brouillard
qui se lève, tant au niveau du décor et de l’ambiance qu’au niveau des
personnages.
Quand
on voyage, les émotions sont différentes suivant le pays que l’on visite. Le
décor sera différent si l’on va aux USA, en Inde, en Afrique ou en
Nouvelle-Zélande. Pour un livre, c’est pareil. Le décor n’est… qu’un décor.
Quant
au fantastique, c’est un domaine où l’imagination peut s’exprimer sans limite,
où presque tout est permis, à condition de créer un univers cohérent et riche.
Cependant, mes romans fantastiques sont à la frontière du roman classique. En
effet, le fantastique n’étant pour moi qu’un décor, il reste dépourvu de
« merveilleux », au sens féérique du terme. Ce ne sont pas des romans
d’Héroïc Fantasy. Les éléments fantastiques trouvent toujours une explication
plus ou moins rationnelle, évolution naturelle pour les plantes et les animaux,
modification du climat, etc. Et évolution de l’espèce humaine pour les
personnages, comme Dorian et Solyane. Le but de Phénix est de montrer que
l’être humain est en perpétuelle évolution et que l’homosapiens actuel
connaîtra des mutations. Les pouvoirs de mes héros ne sont que des hypothèses.
Actuellement, l’homme s’oriente plutôt vers une fusion avec le robot
(prothèses, cœur artificiel, etc). Mais je pense qu’il ne faut pas perdre de vue
l’évolution spirituelle. Les religions, qui ne sont pour moi que des
superstitions dont les effets se révèlent bien trop souvent néfastes, doivent
évoluer, elles aussi, vers une spiritualité ouverte d’esprit qui permettra à
l’être humain de s’élever. Mais il y a beaucoup de chemin à faire.
Enfin,
mes romans fantastiques ne sont pas innocents, ils me permettent d’exprimer
certaines idées. Graal, par exemple, est un réquisitoire contre l’intégrisme.
La Porte de Bronze est une réflexion sur le sens de la vie et de l’univers.
Parmi tous les personnages que vous avez créés, vous
êtes-vous plus attaché à certains ? Pourquoi ?
Je me
suis attaché à tous mes personnages, sachant que j’ai une petite préférence
pour mes petites héroïnes. Peut-être parce que je suis un homme. Mais surtout
parce que ce sont des femmes dotées de personnalités marquées. Je suis
féministe, sans toutefois adhérer aux excès de ce mouvement. Mais je trouve
inacceptable l’ostracisme dont les femmes sont victimes depuis la nuit des
temps de la part des hommes. Créer des héroïnes qui ne se laissent pas monter
sur les pieds par les hommes est ma manière de lutter contre le machisme
imbécile.
Et
j’estime qu’on ne pourra se prétendre vraiment civilisés qu’à partir du moment
où cet ostracisme stupide aura disparu. Malheureusement, je crains que cela
prenne encore beaucoup de temps.
Pour en
revenir à mes héroïnes, il y en a une qui m’a marqué plus que les autres :
ma Solyane de Phénix. Solyane est un prénom que j’ai créé pour un roman en deux
volumes, antérieur à Phénix, et qui ne sera jamais publié (il est bourré
d’erreurs !) Cette Solyane-là apparaissait dans les derniers chapitres du
deuxième tome. Le prénom m’était apparu spontanément, venant de… d’ailleurs. Le
mystère de la création. Le personnage en question, qui n’avait pas une grande
importance, rayonnait d’une personnalité tout à fait inattendue. Elle était
lumineuse. Aussi, lorsqu’il m’a fallu un prénom pour l’héroïne de Phénix, je n’ai
pas hésité une seule seconde. Je ne fus pas le seul à être marqué par ce
prénom, puisqu’il est porté aujourd’hui par plus de cent jeunes femmes et
petites filles, à cause du roman. J’en connais quelques-unes.
En tant qu'auteur, avez-vous parfois de la peine à
quitter, une fois le livre achevé, le monde dans lequel vous avez fait évoluer
vos personnages ?
Toujours.
On s’attache aux personnages que l’on crée et on ne les quitte pas impunément. Il
m’est même arrivé de pleurer à cause de cette séparation, comme avec le Moïse (Moïse le pharaon rebelle). Il faut dire
que ce personnage est très attachant et que la fin est très chargée en
émotions. Ce n’est pas un roman religieux, puisque je suis non-croyant. Mon
Moïse est celui qui dit : aime ton prochain comme toi-même. Ce qui pour
moi veut dire : aime-le tel qu’il est et non tel que tu voudrais qu’il
soit, c’est à dire à ta ressemblance. Il faut prendre les gens comme ils sont,
avec leurs qualités et leurs défauts. Car, avec l’expérience, on s’aperçoit que
l’on apprécie les gens à cause de leurs qualités, mais on les aime grâce à
leurs défauts.
Votre premier roman, Phénix a été publié en 1986 aux
Éditions du Rocher. Comment s'est passée votre première aventure dans le monde
de l'écriture et de l'édition ?
Pour la
réponse à cette question, je vous joins en fin d’interview un document que j’ai
écrit il y a quelques semaines et qui relate cette aventure. (Cliquez ici pour accéder à ce texte)
Quel est votre meilleur souvenir à ce sujet ? Et votre
pire souvenir ?
J’ai
beaucoup de bons souvenirs dans cette activité. Le plus surprenant est sans doute
celui où Jean-Paul Bertrand m’a appelé pour me dire qu’il allait publier Phénix
(voir le document de fin). Mais il y en a d’autres, comme quand j’ai appris que
des parents voulaient donner le prénom de Solyane à leur petite fille. À cette
époque, on ne pouvait pas donner un prénom inventé. La mairie refusait Solyane
et la mère refusait toutes ses propositions. Le papa n’arrêtait pas de faire l’aller-retour
entre la clinique et la mairie. À tel point que pendant cinq jours, la petite
fille n’a porté que son nom de famille. Finalement, c’est le tribunal qui a
tranché en faveur des parents. Solyane a aujourd’hui 27 ans et vit à Milan. On
s’écrit toujours.
Depuis peu, vous avez créé votre propre maison « BS
Éditions ». Pouvez-vous nous expliquer ce choix ?
En
fait, je n’ai pas créé de maison d’édition. J’ai simplement récupéré les droits
de mes romans parus aux Editions du Rocher, qui ont été récemment rachetées.
J’ai mis ce logo sur mes romans afin de les différencier, mais je vais le
retirer. BS Editions n’existe pas. Tout au moins pas encore. Les derniers ne
portent que mon nom d’auteur. Et je ne suis pas sûr d’avoir envie de créer une
maison d’édition. Ce n’est pas mon rôle.
Quels sont les obstacles les plus difficiles à
franchir dans cette aventure et pourquoi ?
Si le
livre est bon, vous trouverez toujours un éditeur. Méfiance toutefois, ils ne
sont pas tous honnêtes. En aucun cas un éditeur ne doit vous demander d’argent
pour publier votre roman. Heureusement, internet permet de s’autoéditer. Mais ce
n’est pas toujours facile, et l’aide d’un éditeur honnête est préférable dans cette
aventure.
Au fil de ce parcours, vous êtes-vous entouré de volontaires
(bêta-lecteurs...) et/ou professionnels indépendants (correcteurs,
graphistes...) ?
Jamais.
J’ai toujours travaillé directement avec mes éditeurs. Et je corrige moi-même
mes manuscrits.
Auriez-vous un message à transmettre aux jeunes
auteurs qui se lancent, comme moi, dans la diffusion de leurs ouvrages ?
Avez-vous des projets d'écriture en cours ?
Je publie début avril chez Calmann-Lévy un roman policier qui
se déroule en Touraine. Parallèlement, je rédige un livre touristique, à la
demande d’un ami, sur cette même Touraine.
Ensuite, j’écrirai une suite au roman policier et
ENFIN ! (j’espère), la suite et fin de ma série Les Enfants de l’Atlantide,
que mes lecteurs me réclament depuis douze ans.
Mais il y a encore d'autres projets à suivre après.
Merci infiniment Bernard Simonay d'avoir accepté cette interview et pris le temps de répondre avec autant de précision à toutes mes questions. Pour ma part, j'ai hâte que la suite des Enfants de l'Atlantide soit entre mes mains !